De l'adoption dans le code civil vers 1874
Aujourd'hui suite des recherches sur l'adoption par Marie Plagnes de sa fille naturelle Marguerite.
Je ne sais pas encore pourquoi elle a du procéder à cette adoption, alors qu'elle est la mère déclarée de Marguerite sur l'acte de naissance et l'acte de mariage de sa fille. Néanmoins je connais les raisons de ce parcours de la combattante.
Grâce à l'excellent site Criminocorpus, Musée d'histoire de la justice, des crimes et des peines, qui compare notamment les évolutions du code civil, j'ai pu avoir une idée de l'adoption dans le code civil à l'époque où Marie Plagnes a adopté Marguerite.
Voici ce que cela devait donner et en quoi cela s'est appliqué à Marie et Marguerite Plagnes.
CODE CIVIL
TITRE VIII
DE L’ADOPTION ET DE LA TUTELLE OFFICIEUSE
CHAPITRE I
DE L’ADOPTION
Section I — De l’adoption et de ses effets
Article 343
L’adoption n’est permise qu’aux personnes de l’un ou de l’autre sexe, âgées de plus de cinquante ans, c'est le cas de Marie depuis 1872 qui n’auront à l’époque de l’adoption, ni enfants, ni descendants légitimes, et qui auront au moins quinze ans de plus que les individus qu’elles se proposent d’adopter Marie avait 24 ans à la naissance de Marguerite.
Article 344
Nul ne peut être adopté par plusieurs, si ce n’est par deux époux. Hors le cas de l’article 366, nul époux ne peut adopter qu’avec le consentement de l’autre conjoint. Marie est seule à adopter.
La faculté d’adopter ne pourra être exercée qu’envers l’individu à qui l’on aura, dans sa minorité et pendant six ans au moins, fourni des secours et donné des soins non interrompus, a priori Marie a élevé Marguerite ou envers celui qui aurait sauvé la vie à l’adoptant, soit dans un combat, soit en le retirant des flammes ou des flots. Il suffira, dans ce deuxième cas, que l’adoptant soit majeur, plus âgé que l’adopté, sans enfants ni descendants légitimes; et s’il est marié, que son conjoint consente à l’adoption.
Article 346
L’adoption ne pourra, en aucun cas, avoir lieu avant la majorité de l’adopté. Si l’adopté, ayant encore ses père et mère, ou l’un des deux, n’a point accompli sa vingt-cinquième année, il sera tenu de rapporter le consentement donné à l’adoption par ses père et mère, ou par le survivant; et s’il est majeur de vingt-cinq ans, de requérir leur conseil. Marie a bien plus de 21 ans et son seul parent connu est Marguerite.
Article 347
L’adoption conférera le nom de l’adoptant à l’adopté, en l’ajoutant au nom propre de ce dernier. Marguerite était déjà nommée Plagnes, du moins à son mariage.
Article 348
L’adopté restera dans sa famille naturelle, et y conservera tous ses droits; néanmoins le mariage est prohibé Entre l’adoptant, l’adopté et ses descendants; Entre les enfants adoptifs du même individu; Entre l’adopté et les enfants qui pourraient survenir à l’adoptant; Entre l’adopté et le conjoint de l’adoptant, et réciproquement entre l’adoptant et le conjoint de l’adopté.
Article 349
L’obligation naturelle, qui continuera d’exister entre l’adopté et ses père et mère, de se fournir des aliments dans les cas déterminés par la loi, sera considérée comme commune à l’adoptant et à l’adopté, l’un envers l’autre.
Article 350
L’adopté n’acquerra aucun droit de successibilité sur les biens des parents de l’adoptant; Marguerite Lambert-Lamothe et Antoine Plagnes, la mère et le père de Marie sont décédés respectivement en 1866 et 1868 mais il aura sur la succession de l’adoptant les mêmes droits que ceux qu’y aurait l’enfant né en mariage, même quand il y aurait d’autres enfants de cette dernière qualité nés depuis l’adoption.
Article 351
Si l’adopté meurt sans descendants légitimes, les choses données par l’adoptant, ou recueillies dans sa succession, et qui existeront en nature lors du décès de l’adopté, retourneront à l’adoptant ou à ses descendants, à la charge de contribuer aux dettes, et sans préjudice des droits des tiers. Le surplus des biens de l’adopté appartiendra à ses propres parents; et ceux-ci excluront toujours, pour les objets même spécifiés au présent article, tous héritiers de l’adoptant autres que ses descendants.
Article 352
Si du vivant de l’adoptant, et après le décès de l’adopté, les enfants ou descendants laissés par celui-ci mouraient euxmêmes sans postérité, l’adoptant succédera aux choses par lui données, comme il est dit en l’article précédent; mais ce droit sera inhérent à la personne de l’adoptant, et non transmissible à ses héritiers, même en ligne descendante
Section II — Des formes de l’adoption Voilà qui explique le périple judiciaire de Marie pour adopter Marguerite
Article 353
La personne qui se proposera d’adopter, et celle qui voudra être adoptée, se présenteront devant le juge de paix du domicile de l’adoptant, pour y passer acte de leurs consentements respectifs. Le juge de paix du canton de Montaigu en a dressé procès-verbal le 26 janvier 1874.
Article 354
Une expédition de cet acte sera remise, dans les dix jours suivants, par la partie la plus diligente, au procureur de la République près le tribunal de première instance dans le ressort duquel se trouvera le domicile de l’adoptant, pour être soumis à l’homologation de ce tribunal. L'expédition a été au final remise au maire qui transcrit...
Article 355
Le tribunal, réuni en la chambre du conseil, et après s’être procuré les renseignements convenables, vérifiera, 1° si toutes les conditions de la loi sont remplies; 2° si la personne qui se propose d’adopter, jouit d’une bonne réputation.
Article 356
Après avoir entendu le procureur de la République, et sans aucune autre forme de procédure, le tribunal prononcera, sans énoncer de motifs, en ces termes : Il y a lieu, ou Il n’y a pas lieu à l’adoption. ... et le jugement du tribunal de Moissac est rendu le trois mars 1874 soit bien moins de trois mois après le procès -verbal du juge de paix.
Article 357
Dans le mois qui suivra le jugement du tribunal de première instance, ce jugement sera, sur les poursuites de la partie la plus diligente, soumis à la cour d’appel, qui instruira dans les mêmes formes que le tribunal de première instance, et prononcera, sans énoncer de motifs : Le jugem ent est confirmé, ou Le jugement est réformé; en conséquence, il y a lieu, ou il n’y a pas lieu à l’adoption. Arrêt de la cour d'appel de Toulouse du 8 juin 1875, il aura fallu plus d'un an après le tribunal, on comprendra mieux l'article 360.
Article 358
Tout arrêt de la cour d’appel qui admettra une adoption, sera prononcé à l’audience, et affiché en tels lieux et en tel nombre d’exemplaires (25) que le tribunal jugera convenables.
Article 359
Dans les trois mois qui suivront ce jugement, l’adoption sera inscrite, à la réquisition de l’une ou de l’autre des parties, sur le registre de l’état civil du lieu où l’adoptant sera domicilié. Cette inscription n’aura lieu que sur le vu d’une expédition en forme du jugement de la cour d’appel; et l’adoption restera sans effet si elle n’a été inscrite dans ce délai. Marie requiert le Maire qui fait l'inscription sur le registre de l'état civil de Roquecor, le 12 août 1875, nous sommes bien dans le délai de tris mois après l'arrêt de la Cour de Toulouse.
Article 360
Si l’adoptant venait à mourir après que l’acte constatant la volonté de former le contrat d’adoption a été reçu par le juge de paix et porté devant les tribunaux, et avant que ceux-ci eussent définitivement prononcé, l’instruction sera continuée et l’adoption admise, s’il y a lieu. Les héritiers de l’adoptant pourront, s’ils croient l’adoption inadmissible, remettre au procureur de la République tous mémoires et observations à ce sujet.